Photo : Jesús Alberto Benítez et Romain Guillo.
Photo : Jesús Alberto Benítez et Romain Guillo.
BOULON CANESSON HUSSON WALLON
Inviter Corentin Canesson pour une exposition, c’est s’attendre à ce qu’il ne vienne pas seul.
« Boulon, Canesson, Husson, Wallon » inscrit sur l’affiche à l’entrée de monopôle n’est pas le titre de l’exposition, ni même Never More que l’on trouve dans le sas. Mais ça pourrait.
Le « vrai titre » sonne lui aussi en différé, Next One is Real tandis que l’exposition commence ou se termine plus bas, à la Salle de bains, selon qu’on soit plutôt d’humeur à monter ou à descendre les pentes de la Croix-Rousse.
Comme il aime souvent à le faire, l’artiste a laissé la liberté à l’équipe chargée de cette exposition de choisir et d’agencer les œuvres avec pour seul impératif cette liste de noms en «on ». Cela ne fait pas un thème pour une exposition, mais de toutes façons les thèmes que l’on donne aux expositions sont toujours des prétextes plus ou moins bons (rime).
Dans l’ensemble disponible, il était tout de même plus ou moins question de paysage (mais est-ce une question ?), de peinture d’après la peinture (là oui, des questions se profilent), d’une certaine dose de rêvasseries que pourraient aimablement accompagner les sculptures de Benjamin Husson dispensatrices d’alcools et poèmes, le tout avec un arrière-goût de fête médiévale (peut-être), un certain sens de la décadence (c’est sûr).
C’est le ton de cette frise qui se regarde en levant les yeux, telle une représentation des enfers dans une église romane, sauf qu’ici ça dépasse un peu du mur et que ça ressemble plutôt à un camp de nudistes en pleine décompensation. C’est comme si la Nef des fous avait accosté dans le tableau, sur un lambeau de terre coincé entre une rangée d’arbres au premier plan, un lac, des montagnes, une bande de ciel. À partir de là les figures n’ont plus qu’à trouver des occupations avec les éléments conventionnels qui composent le paysage : se baigner dans le lac, s’adonner à une cure énergétique par les arbres ou à des pratiques éco-sexuelles, faire la fête (l’artiste ayant eu la clémence d’installer un bar dans le décor), ou encore peindre ce même paysage. Ainsi se termine l’histoire sans cesse recombinée : par un cours de pratiques amateures et des tableaux dans le tableau.
L’exposition multiplie donc les effets de mise en abyme, répétitions, clins d’œil, pour mettre le doigt sur la dimension critique de cette peinture au second degré. Non que tout cela manque de sérieux, pour preuve les hommages dans tous les sens à l’histoire de l’art qui traduisent un amour sincère et immodéré de la peinture (de Bram Van Velde à Eugène Leroy en passant par Shirley Jaffe ou encore Signac). Mais la peinture est célébrée en même temps que la fin de son histoire héroïque, patriarcale et en grand format. Nevermore peut s’entendre comme une bonne résolution (par exemple, celle d’arrêter de boire) mais on pourrait aussi lui trouver un écho plus politique : entre la connotation gériatrique de ces vins servis au goutte à goutte et une représentation vaporeuse de Judith décapitant Holopherne, ça rime un peu avec «destitution ».
Invite Corentin Canesson to exhibit and never expect him to show up alone.
“Boulon, Canesson, Husson, Wallon,” written out on the poster hanging at the entrance to monopôle isn’t the title of the show, nor even “Never More,” which is seen in the entry vestibule. But it could be. The “real title” is not heard live as it were, “Next One is Real,” while the exhibition begins, or ends, further below, at La Salle de bains, depending on visitors’ mood, whether to walk up or down the slopes of La Croix-Rousse.
As he often likes to do, the artist left the team in charge of the show to choose and install the works of art with one requirement, that list of nouns ending in “on.” That doesn’t amount to a theme for an exhibition; then again the themes given to art shows are always a pretext that can’t be outdone (which rhymes).
With the available collection, it was more or less a question of landscapes (but is that a question?), of painting after a painting (here indeed questions arise and not a few), of a certain dose of dreaming that could graciously accompany Benjamin Husson’s drink-distributing sculptures that dispense alcoholic spirits and poems, the whole thing with an aftertaste of medieval revelry (maybe), a certain sense of decadence (that’s for sure).
It’s the tone of this frieze that must be looked at with raised eyes, like a depiction of Hell in a Romanesque church, except that in this case, it extends a bit beyond the wall and sort of looks like a camp full of nudists right in the middle of organ decompensation. It’s as if in the painting the Ship of Fools had drawn up alongside a spit of land squeezed between a row of trees in the foreground, a lake, mountains, and a strip of sky. From there the figures need only go in search of activities with the conventional elements making up the landscape, i.e., swim in the lake, indulge in an energetic bit of physical therapy by the trees or eco-sexual practices, party on (the artist has had the lenity to set up a bar on the premises), or paint the very landscape we see. So ends the ceaselessly recombined story, with a class on amateur practices and paintings within the painting.
The show thus conceals, unseals, and reveals over and over mise en abyme effects, repetitions, knowing winks and fourth-wall asides, in order to point out the critical dimension of this leg-pulling painting. It’s not that all of this lacks seriousness; by way of proof, we have the many clear instances of paying homage, in every sense of the term, to art history, and those translate a sincere and excessive love of painting (from Bram Van Velde to Eugène Leroy by way of Shirley Jaffe, along with Picasso and Signac). But painting is celebrated at the same time as the end of its heroic, patriarchal and large-scale phase. “Nevermore” can be understood as a good resolution (for example, the resolution to stop drinking) but that one word might also suggest a political echo, between the geriatric connotation of those wines served drop by drop and a misty depiction of Judith decapitating Holofernes, which rhymes a bit with “destitution.”
Liste des œuvres :
List of works :
acrylique sur toile, 100 × 100 cm
Marine Wallon, Dùn Canna, 2023
huile sur toile, 33 × 41 cm
Courtesy Galerie Catherine Issert
Corentin Canesson, sans titre, 2017
acrylique sur toile, 30 × 24 cm
Corentin Canesson, sans titre, 2022
acrylique sur toile, 30 × 24 cm
Corentin Canesson, sans titre, 2023
acrylique sur toile, 30 × 24 cm
Marine Wallon, Uinta Wasatch, 2023
huile sur toile, 30 × 35 cm
Courtesy Galerie Catherine Issert
Corentin Canesson, sans titre, 2023
acrylique sur toile, 30 × 24 cm
Marine Wallon, Fakarava, 2023
huile sur toile, 24 × 18 cm
Courtesy Galerie Catherine Issert
Marine Wallon, Matahi, 2022
huile sur toile, 24 × 18 cm
Courtesy Galerie Catherine Issert
Noémie Boulon, Sous-bois, 2023
techniques mixtes, 277 × 175 cm
Corentin Canesson, sans titre, 2019
acrylique et huile sur toile, 150 × 140 cm
Benjamin Husson, irrigation guest, 2023
verre, acier forgé, goutte-à-goutte, vin rouge,
200 × 70 × 80 cm
texte : Agathe Chevallier, Iskander, 2024
Benjamin Husson, irrigation guest, 2023
verre, acier forgé, goutte-à-goutte, vin blanc,
200 × 70 × 80 cm
textes : Agathe Chevallier,
Commandez nos mots et
minutes chances dernières, 2024
Benjamin Husson,
fountain / pressurised scoliosis, 2023
acier, tireuse à bière, bières, 75 × 95 × 175 cm
textes : Agathe Chevallier,
Commandez nos mots et
minutes chances dernières, 2024
(le soir du vernissage seulement)
Corentin Canesson, Nevermore, 2020
acrylique et huile sur toile, 80 × 100 cm
Corentin Canesson, sans titre, 2020
acrylique et huile sur toile, 80 × 70 cm
Corentin Canesson, sans titre, 2020
acrylique et huile sur toile, 80 × 100 cm
Corentin Canesson, sans titre, 2020
acrylique et huile sur toile, 80 × 60 cm
Corentin Canesson, sans titre (Judith!), 2020
acrylique et huile sur toile, 80 × 80 cm
Corentin Canesson, sans titre, 2023
acrylique et huile sur toile, 80 × 70 cm
Corentin Canesson, sans titre, 2023
acrylique sur toile, 80 × 150 cm
Corentin Canesson, sans titre, 2020
acrylique sur toile, 80 × 120 cm
Corentin Canesson, sans titre (Annecy), 2020
acrylique sur toile, 80 × 80 cm
acrylic on canvas, 100 × 100 cm
2 - Marine Wallon, Dùn Canna, 2023
oil on canvas, 33 × 41 cm
Courtesy Galerie Catherine Issert
3 - Corentin Canesson, sans titre, 2017
acrylic on canvas, 30 × 24 cm
4 - Corentin Canesson, sans titre, 2022
acrylic on canvas, 30 × 24 cm
5 - Corentin Canesson, sans titre, 2023
acrylic on canvas, 30 × 24 cm
6 - Marine Wallon, Uinta Wasatch, 2023
oil on canvas, 30 × 35 cm
Courtesy Galerie Catherine Issert
7 - Corentin Canesson, sans titre, 2023
acrylic on canvas, 30 × 24 cm
8 - Marine Wallon, Fakarava, 2023
oil on canvas, 24 × 18 cm
Courtesy Galerie Catherine Issert
9 - Marine Wallon, Matahi, 2022
oil on canvas, 24 × 18 cm
Courtesy Galerie Catherine Issert
10 - Noémie Boulon, Sous-bois, 2023
mixed media, 277 × 175 cm
11 - Corentin Canesson, sans titre, 2019
acrylic and oil on canvas, 150 × 140 cm
12 - Benjamin Husson, irrigation guest, 2023
glass, forged steel, drip, red wine,
200 × 70 × 80 cm
text : Agathe Chevallier, Iskander, 2024
13 - Benjamin Husson, irrigation guest, 2023
glass, forged steel, drip, white wine,
200 × 70 × 80 cm
texts : Agathe Chevallier,
Commandez nos mots and
minutes chances dernières, 2024
14 - Benjamin Husson,
fountain / pressurised scoliosis, 2023
steel, beer taps, beers, 75 × 95 × 175 cm
texts : Agathe Chevallier,
Commandez nos mots and
minutes chances dernières, 2024
(during the opening only)
A - Corentin Canesson, Nevermore, 2020
acrylic and oil on canvas, 80 × 100 cm
B - Corentin Canesson, sans titre, 2020
acrylic and oil on canvas, 80 × 70 cm
C - Corentin Canesson, sans titre, 2020
acrylic and oil on canvas, 80 × 100 cm
D - Corentin Canesson, sans titre, 2020
acrylic and oil on canvas, 80 × 60 cm
E - Corentin Canesson, sans titre (Judith!), 2020
acrylic and oil on canvas, 80 × 80 cm
F - Corentin Canesson, sans titre, 2023
acrylic and oil on canvas, 80 × 70 cm
G - Corentin Canesson, sans titre, 2023
acrylic on canvas, 80 × 150 cm
H - Corentin Canesson, sans titre, 2020
acrylic on canvas, 80 × 120 cm
I - Corentin Canesson, sans titre (Annecy), 2020
acrylic on canvas, 80 × 80 cm
Né en 1988, Corentin Canesson vit et travaille à Troyes et Paris.
Diplômé de l’EESAB-site de Rennes en 2011. Il a participé au 21e Prix de la Fondation d’entreprise Ricard Le Fil d’Alerte et son travail a été présenté à la galerie Nathalie Obadia (2018), au Crédac – Centre d’art contemporain d’Ivry-sur-Seine (2017), à Passerelle Centre d’art contemporain Passerelle de Brest (2015) et plus récemment au Visual Arts Center à Austin, Etats-Unis (2022) et au Centre d'art contemporain CIRCUIT à Lausanne (2023).
Son travail est représenté par la galerie Sator.
Born 1988, Corentin Canesson lives and works in Troyes and Paris.
afetr his graduation from EESAB-site de Rennes en 2011. He participated to the 21st Prix de la Fondation d’entreprise Ricard Le Fil d’Alerte and his work has been shown at the galerie Nathalie Obadia (2018), at the Crédac – Centre d’art contemporain, Ivry-sur-Seine (2017), in Passerelle Centre d’art contemporain Passerelle de Brest (2015) and more recently at the Visual Arts Center, Austin, USA (2022) and at the Centre d'art contemporain CIRCUIT, Lausanne, Switzerland (2023).
Canesson's work is represented by the galerie Sator.
Avec Noémie Boulon, Corentin Canesson, Benjamin Husson, Marine Wallon
Dans le cadre de l'exposition Next One is Real, La salle de bains, 2024
monopôle
4 Boulevard des Canuts 69004 Lyon
vendredi 16h - 19h et samedi 15h - 19h
et sur rendez-vous
@monopole_org
poletechniquelyon@gmail.com
as part as Next One is Real, La salle de bains, 2024
monopôle
4 Boulevard des Canuts 69004 Lyon
Friday 4 - 7pm and Saturday 3 - 7pm
and by appointment
@monopole_org
poletechniquelyon@gmail.com
de la Région Auvergne-Rhône-Alpes et de la Ville de Lyon.
monopôle reçoit le soutien de la Ville de Lyon.
Un projet en partenariat avec Le Sonic, Lyon.