LA SALLE DE BAINS
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Gibber – salle 1

Mathis Altmann

2023

27 janvier – 25 février 2023

 

Salle 1

 

C’est le genre de recette éculée par des générations de designers d’affiches de films d’horreur et de jaquettes de romans noir – également valables pour les rééditions et les remakes ˗ dont il faut bien reconnaître qu’elle continue de soutenir la promesse d’un frisson. Comme si la communication de masse n’avait pas seulement remanié le paysage mais imprimé en nous une gamme de réflexes pavloviens que stimulent certaines polices de caractères parmi les plus usuelles et librement accessibles. Écrit comme un graffiti sanglant, le titre de l’exposition de Mathis Altmann à La Salle de bains laisse donc envisager cette première salle comme la scène inaugurale d’une fiction qui tournerait au chaos.

Sous ces auspices, en tombant nez à nez avec cette enfilade d’assemblages reliés entre eux par des câbles électriques, l’on pourrait s’imaginer avoir poussé la porte du laboratoire d’un scientifique renégat et mégalo de ceux qui fomentent un plan machiavélique au début des films de série B. En effet, l’appareillage technologique greffé sur les couvercles de verre qui donnent aux sculptures cet aspect de couveuses bioniques ainsi que le brouhaha entremêlé de voix robotiques charrient leur lot d’imaginaires rétro-futuristes.

Mais notons surtout que quelque chose se prépare ˗ comme une exposition en trois volets, qu’un process est en marche : celui d’une œuvre qui se génère et se ramifie depuis une dizaine d’années en contrepoint du scénario plus ou moins prévisible que décrit le développement du capitalisme mondialisé. Mathis Altmann en observe les effets sur notre environnement matériel, nos usages quotidiens, l’aménagement de nos désirs au gré de nos aspirations personnelles ou collectives, et ce avec une perspicacité rare teintée d’un humour louable, quand le constat du désastre fait tellement consensus qu’il participe de la farce. Sa pratique du collage et de l’assemblage, souvent rapprochée de l’héritage des avant-gardes européennes pour ses ressorts critiques pourrait aussi bien renvoyer à une tradition de la côte Ouest des États-Unis, où, dans les années 1960, l’usage des matériaux de rebuts répondait à la pauvreté proliférante à la marge du modèle libéral et exacerbait un climat de confusion idéologique.

C’est d’ailleurs en quittant Los Angeles il y a quelques années que Mathis Altmann s’est installé à Berlin dont les évolutions urbaines constituent désormais le thème central de son travail. La ville fournit au sens propre une partie du matériau de l’œuvre en rejetant dans la rue un flot de débris au rythme de la gentrification systématique de ses quartiers périphériques. Ces matériaux sont réemployés dans les sculptures qui peuvent à leur tour être recyclées dans de nouvelles œuvres comme celles présentées à La Salle de bains, augmentées par un appareillage de technologies récentes qui les remasterisent, pourrait-on dire, en objets lumineux et sonores. Ainsi, l’œuvre procède-t-elle d’un mouvement organique et cyclique (propre au remix) qui va dans le sens inverse de l’expansion de la « ville générique » dont Rem Koolhaas décrit le principe « amnésique » consistant à effacer et remplacer tout ce qui ne répond plus aux nécessités et aux goûts contemporains.

Il ne s’agit pas de donner ici une interprétation narrative de cette installation dont on aura sûrement pu, à ce stade de la lecture, éprouver le caractère hypnotique. Précisons cependant que les bribes absconses de discours émanant de la sculpture située en face du miroir et qu’accompagne le beat sourd qui, à l’entrée, fait vibrer une évocation sensible d’un club techno aménagé dans une usine désaffectée, sont puisées dans la novlangue promotionnelle qui entoure les grandes campagnes de rénovation urbaines berlinoise. Ces dernières donnent leur titre à l’exposition qui propose un diminutif de « gibberish » traduisible par « baratin » ou « charabia ». Aussi ce qui se présente à la fois comme un ensemble de maquettes et comme une machine en rodage pourrait livrer une autre version d’un même rêve (ou cauchemar), soit le refoulé rugueux et ardent des projets de réhabilitation qui prévoient communément l’édification d’immeubles vitrés dédiés au coworking aux abords de friches industrielles reconverties en espaces de loisirs et d’expositions.

 

Liste des œuvres :

 

untitled 1, 2023

plastique, bois, verre, carton, LED, lampe CCFL, haut-parleur à vibration, boucle audio 1h34min

62x70x91cm

 

untitled 2, 2023

plastique, bois, métal, verre, carton, LED, haut-parleur à vibration, boucle audio 05min27

50x94x52cm

 

untitled 3, 2023

plastique, bois, métal, verre, lumière laser, haut-parleur à vibration, boucle audio 06min55

40x82x67cm

 

untitled 4, 2023

plastique, bois, métal, verre, carton, impression photo, écran LED, haut-parleur à vibration, boucle audio 19min56

41x62x64cm

 

 

Biographie :

Mathis Altmann (1987) vit et travaille entre Berlin et Zürich. Son travail a fait l’objet d’expositions monographiques en Allemagne, à Efremidis à Berlin en 2021 ; en Italie, à l’Institut Suisse de Milan en 2018 et en Suisse, au Kunstmuseum de Wintherthur en 2021 et à Truth & Consequences à Genève en 2016.
Il a également participé à de nombreuses expositions collectives en 2021 telles que Bijoux! à Fitzpatrick Gallery à Paris ; Nimmersatt? Imagining Society without Growth au Westfälischer Kunstverein à Münster ; Macht! Licht! au Kunstmuseum Wolfsburg, en Allemagne et en 2020 comme Grand Miniature à Zurich ou encore ANNEMARIE VON MATT. JE NE M’ENNUIE JAMAIS, ON M’ENNUIE au Centre Culturel Suisse à Paris.

Il est représenté par Fitzpatrick Gallery.

→ dossier de presse
Lancement et discussion autour de l’édition « Incomplete Dark Alphabet : Blow Thou Winter Wind » de Michael Myers

Merryl Bouchereau et Jérémie Nuel

2023

Lancement le jeudi 12 janvier à 19h

Discussion avec les artistes Merryl Bouchereau (dessinateur) et Jérémie Nuel (designer graphique) dans le cadre du lancement de l’édition Incomplete Dark Alphabet : Blow Thou Winter Wind de Michael Myers

 

Incomplete Dark Alphabet de Michael Myers est le fruit d’une collaboration entre l’artiste Merryl Bouchereau et le graphiste Jérémie Nuel.
Blow Thou Winter Wind est la deuxième version de cette édition générée par un système informatisé depuis une série de dessins issus d’une collection d’images et de sons, à la croisée du black metal, de l’univers du tatouage et de la peinture préraphaélite.

 

Biographies :

Merryl Bouchereau, né à Quimper, est un artiste travaillant à Lyon au sein de l’espace Montebello. Le travail de Merryl Bouchereau a été présenté à la Cité du design en 2016 et 2017. Il a également exposé à la dernière Biennale internationale du Design de Saint-Étienne.

Jérémie Nuel est designer graphique basé à Lyon. Il enseigne à l’École supérieure d’art et design de Saint Étienne au sein de la mention Création numérique et participe aux projets de recherche du random(lab).