









Photo: Jesús Alberto Benítez
Photo: Jesús Alberto Benítez
Basket case - salle 2 – Asile!
Pendant le montage de cette deuxième salle, alors que nous dissertions sur le rapport de la sculpture à l’espace d’exposition, Cécile Bouffard nous confiait avoir adopté deux types de stratégies : dans le cas d’une exposition collective, elle préfère disposer ses œuvres une fois que celles des autres artistes sont installées, plus ou moins à l’écart, ce qui leur confère, en quelques sortes, un rôle de « témoin » ; à l’inverse elle envisage presque toujours l’espace de ses expositions personnelles comme une « scène », ce qui peut s’entendre comme un décor autant qu’une unité de temps dans un scenario plus vaste dont les témoins sont cette fois les spectateur·trices.
En vue de la première salle, elle décrivait « un univers capitonné, dans lequel, en latence, les sculptures incarnent des manières qui laissent penser qu’elles sont prêtxs à agir, à gémir, à passer à l’acte ». Elle ajoutait : « un peu comme si on était dans une réunion de personnes souffrant de troubles du comportement qui préparaient une échappée maligne ». Ce titre en forme d’exclamation est donc réversible, de la stigmatisation indignée à la clameur salvatrice, ici, « Asile ! » c’est un peu comme décréter « Champagne ! ».
S’il fallait situer la scène, ce serait davantage dans un salon libertin qu’à l’hôpital psychiatrique, à moins d’y assister à une insurrection. Et tant qu’à personnifier les sculptures – qui s’y prêtent volontiers par leurs titres et leurs contours humanoïdes ou zoomorphes – les introverties de la première salle, contenues dans ce qui pouvait évoquer tantôt le pansement tantôt la camisole de force, présentent ici tous les signes d’une décompensation à caractère festif. Par ailleurs les réminiscences d’objets appartenant au monde médiéval ou aux traditions rurales ont laissé place à un vocabulaire de formes plus clairement empruntées à la sphère des jeux sexuels. Il en va de même des matières textiles, serviettes éponges et pièces de satin auxquelles se suspendent et s’enlacent les formes invariablement façonnées en bois qui exaltent leurs talents de transformistes.
Car ce revirement de situation dans la narration, s’il est un prétexte, met l’accent sur un traitement particulier du bois qui joue le trompe l’œil à la surface comme dans la matière. Elle s’étire et se déforme selon une élasticité feinte qui donne aux matériaux la même consistance que les personnages de cartoons. N’est-ce pas finalement le lien de parenté entre les sculptures de Cécile Bouffard et le dessin (animé) qui s’affiche au grand jour dans cette scène de liesse en deux dimensions ? D’où peut-être la manière dont ces « objets » – comme elle préfère les nommer – signalent leur relation au plan par des systèmes d’accroche plus ou moins ostentatoires.
Enfin, ces esquisses d’éléments décoratifs et, indifféremment, de possibles sculptures, déplacent un geste d’atelier dans l’espace d’exposition, plus que jamais fantasmé.
While mounting this second part, we got to talking about sculpture’s relationship to the exhibition space and the artist Cécile Bouffard confided to us that she has adopted two strategies. When dealing with a group show, she prefers to place her works only when those of the other artists have been installed, more or less at a distance, something that lends them in a way the role of a “token,” a “witness”; on the other hand, the artist almost always imagines the space of her solo shows as a “stage,” which can be understood as a setting as much as a unit of time in a more extensive scenario whose witnesses in this case are the viewers themselves.
In light of the first gallery, she described “a padded world in which the sculptures latently embody ways that suggest they are pretexts for doing, moaning, acting out.
She added, “A bit like we were at a meeting of people suffering from behavior disorders who were preparing a cunning break out.” The exhibition title then, taking the form of an exclamation, is reversible, from indignant stigmatization to a life-saving hue and cry. Here Asile! (Asylum!) is something like decreeing “Champagne!”
If we had to locate the scene, it would be more in a libertine salon than in a psychiatric hospital, unless we are actually watching an insurrection unfold. And as much as they personify sculptures – which easily lend themselves to that idea thanks to their titles and humanoid and zoomorphic outlines – the introverted characters of the first gallery, contained in what could suggest either a bandage or a straitjacket, display here all the signs of a festive-like decompensation. Moreover, the suggestions of objects that belong in the medieval world or to rural traditions have given way to a vocabulary of forms that are more clearly borrowed from the sphere of sexual games. The same holds for the textiles, the terrycloth towels and lengths of satin hanging from and entwined with shapes that are inevitably fashioned from wood, exalting their shape-shifting talents.
While this one-eighty in the narrative is a pretext, it does emphasize a particular treatment of wood that plays the trompe l’oeil card on both the surface and in the material itself. It stretches and is deformed according to a feigned elasticity that imbues the materials employed with the same consistency seen in cartoon characters. Isn’t this in the end the family tie connecting Cécile Bouffard’s sculptures and the (animated) drawing that is displayed out in the open in that jubilant two-dimensional scene? Which perhaps gives rise to the way these «objects» – as she prefers to call them – announce their link with the wall through systems for hanging the works that are more or less conspicuous. Finally, these sketches of decorative elements and, indifferently, possible sculptures shift a gesture associated with the studio into the exhibition space, which is more than ever a fantasized space.
translation : John O'Toole
Liste des œuvres :
List of works :
crayons de couleur, bois, peinture acrylique, silicone, textile, métal
dimensions variables
Mi lambina, 2022,
textile, bois, peinture acrylique, ampoule
200x65x65cm
wander on desire, 2022,
bois, peinture acrylique, textile
dimensions variables
Colored pencils, wood, acrylic, silicon, fabric, metal
variable dimensions
Mi lambina, 2022,
Wood, acrylic, fabric, light bulb
200x65x65cm
wander on desire, 2022,
Wood, acrylic, fabric
variable dimensions

Cécile Bouffard (1987) vit et travaille à Paris. Son travail a récemment fait l'objet d'expositions monographiques à Rond-Point Projects, Marseille, à la galerie Guadalajara 90210, Mexico, et au Centre d'art contemporain Les Capucins, Embrun.
Très impliquée dans des projets collectifs Cécile Bouffard a co-fondé l'artist-run-space Pauline Perplexe à Arcueil, depuis 2020 elle co-édite la revue VNOUJE (collectif Fusion, avec Roxane Maillet et Clara Pacotte) et fait partie de La Gousse, collectif de cuisine lesbienne (avec Barberin Quintin et Roxane Maillet).
Cécile Bouffard (1987) lives and works in Paris.
Her work has recently been the subject of monographic exhibitions at Rond-Point Projects, Marseille, at the gallery Guadalajara 90210, Mexico, and at the Centre d'art contemporain Les Capucins, Embrun.
Very involved in collective projects, Cécile Bouffard co-founded the artist-run-space Pauline Perplexe in Arcueil, since 2020 she co-edits the magazine VNOUJE (collective Fusion, with Roxane Maillet and Clara Pacotte) and is part of La Gousse, a lesbian cooking collective (with Barberin Quintin and Roxane Maillet).
de la Région Auvergne-Rhône-Alpes et de la Ville de Lyon.
Cette exposition s'inscrit dans le programme Résonance de la 16e Biennale d'art contemporain de Lyon.



