






John M Armleder, À rebours, salle 1, la Salle de bains, Lyon du 15 septembre au 11 novembre 2017. Photos : Jules Roeser
John M Armleder, À rebours, salle 1, la Salle de bains, Lyon from 15th September to 11th November 2017. Photos : Jules Roeser
à rebours - salle 1
Du 15 septembre au 11 novembre 2017From 15 September to 11 November 2017
Ainsi de la plupart des décisions formelles, nous savons bien que les titres, chez John M Armleder, ne répondent qu’aux lois de la contingence. Il est arrivé maintes fois dans l’histoire de l’art, qu’au besoin de nommer ses objets comme des choses spécifiques, ils soient donnés par d’autres. À cet endroit aussi, l’artiste, comme il plaît à John M Armleder d’en qualifier le rôle, serait-il « un dommage collatéral de l’art » ? Devant la réalité implacable des objets qui se présentent à nos yeux de spectateurs, face à la littéralité d’une expérience exempte de toute charge symbolique ou narrative, certains ne pourront se contenter du frisson qui, par bonheur ou par hasard, les traverse. À court d’argument, ils s’en remettront à la référence littéraire. Ainsi noteront-ils la goguenardise de cette contribution à l’usage abusif qu’en a fait le milieu de l’art, ce depuis que la fin proclamée de la modernité y est devenue, à l’exemple de nombreux prétextes esthétiques, un motif. Pendant ce temps, les autres pourront divaguer parmi quelques synonymes évocateurs, « contre-sens », « rebrousse-poil », et se dire qu’il n’est question ici, et partout, que de peinture...
Mais reconnaissons à l’œuvre de Huysmans certains traits communs à celle d’Armleder, comme sa liberté à opérer des variations de styles, l’importance accordée à la vie intérieure, l’intérêt pour la thèse de la décadence ou encore, un usage singulier de l’humour. Mais c’est davantage la figure du personnage de roman à la place de l’artiste que campe, soi-disant malgré elle, la citation. Aussi l’imaginaire convoquera-t-il, parmi les topoï de la littérature romantique, l’image en creux de l’esthète coupé du monde (et de toute possibilité d’aventure), dans un intérieur raffiné où ses efforts et son ingéniosité sont consacrés à la satisfaction de ses propres sens. Ce décor n’est, en revanche, affecté d’aucune forme de nostalgie, l’artiste ayant toujours conservé « la tête froide » depuis que l’art s’est installé sous le tropique de l’éternel retour, et pris garde à ne jamais rien y faire de nouveau (mais seulement plausible comme tel). Aussi, le contretemps serait-il propre à l’apparition même des œuvres de John M Armleder et du plaisir de leur rencontre ? Il notait un jour au sujet d’une Furniture Sculpture réalisée sur ses indications à Vienne puis découverte lors d’une seconde exposition à Salzbourg, que « voir ses œuvres quelques semaines ou mois après les avoir faites, si j’ose dire, est tout de même une expérience suavement délicieuse(1)».
Mais reconnaissons à l’œuvre de Huysmans certains traits communs à celle d’Armleder, comme sa liberté à opérer des variations de styles, l’importance accordée à la vie intérieure, l’intérêt pour la thèse de la décadence ou encore, un usage singulier de l’humour. Mais c’est davantage la figure du personnage de roman à la place de l’artiste que campe, soi-disant malgré elle, la citation. Aussi l’imaginaire convoquera-t-il, parmi les topoï de la littérature romantique, l’image en creux de l’esthète coupé du monde (et de toute possibilité d’aventure), dans un intérieur raffiné où ses efforts et son ingéniosité sont consacrés à la satisfaction de ses propres sens. Ce décor n’est, en revanche, affecté d’aucune forme de nostalgie, l’artiste ayant toujours conservé « la tête froide » depuis que l’art s’est installé sous le tropique de l’éternel retour, et pris garde à ne jamais rien y faire de nouveau (mais seulement plausible comme tel). Aussi, le contretemps serait-il propre à l’apparition même des œuvres de John M Armleder et du plaisir de leur rencontre ? Il notait un jour au sujet d’une Furniture Sculpture réalisée sur ses indications à Vienne puis découverte lors d’une seconde exposition à Salzbourg, que « voir ses œuvres quelques semaines ou mois après les avoir faites, si j’ose dire, est tout de même une expérience suavement délicieuse(1)».
As with most formal decisions, we are well aware that John M Armleder's titles are subject only to the laws of contingency. Time and again in the history of art, the need to name objects as specific things has been met by others. In this respect too, is the artist, as John M. Armleder likes to describe his role, "collateral damage to art"? Faced with the implacable reality of the objects that present themselves to our eyes as spectators, faced with the literalness of an experience devoid of any symbolic or narrative charge, some will not be able to be content with the thrill that, by chance or luck, runs through them. Running out of arguments, they'll turn to literary references. They will note the mockery of this contribution to the misuse made of it by the art world, since the proclaimed end of modernity has become, like many aesthetic pretexts, a motif. In the meantime, others will be able to wander through a few evocative synonyms, "contre-sens", "rebrousse-poil", and tell themselves that here, and everywhere, it's all about painting...
But we must acknowledge that Huysmans' work shares certain traits with Armleder's, such as his freedom to vary styles, the importance given to interior life, his interest in the thesis of decadence and his singular use of humor. But it's more the figure of the novel character in the artist's place that the quotation portrays, supposedly in spite of itself. Among the topoi of Romantic literature, the imagination conjures up the hollow image of the aesthete cut off from the world (and from any possibility of adventure), in a refined interior where his efforts and ingenuity are devoted to the satisfaction of his own senses. On the other hand, there's nothing nostalgic about this setting, as the artist has always kept a "cool head" since art first settled in the tropic of the eternal return, and taken care never to do anything new (but only plausible as such). So is the contretemps inherent in the very appearance of John M Armleder's works and the pleasure of their encounter? He once remarked, in reference to a Furniture Sculpture he had made in Vienna and then discovered at a second exhibition in Salzburg, that "seeing your work a few weeks or months after you've made it, if I may say so, is nonetheless a suavely delightful experience(1)".
But we must acknowledge that Huysmans' work shares certain traits with Armleder's, such as his freedom to vary styles, the importance given to interior life, his interest in the thesis of decadence and his singular use of humor. But it's more the figure of the novel character in the artist's place that the quotation portrays, supposedly in spite of itself. Among the topoi of Romantic literature, the imagination conjures up the hollow image of the aesthete cut off from the world (and from any possibility of adventure), in a refined interior where his efforts and ingenuity are devoted to the satisfaction of his own senses. On the other hand, there's nothing nostalgic about this setting, as the artist has always kept a "cool head" since art first settled in the tropic of the eternal return, and taken care never to do anything new (but only plausible as such). So is the contretemps inherent in the very appearance of John M Armleder's works and the pleasure of their encounter? He once remarked, in reference to a Furniture Sculpture he had made in Vienna and then discovered at a second exhibition in Salzburg, that "seeing your work a few weeks or months after you've made it, if I may say so, is nonetheless a suavely delightful experience(1)".
(1) John Armleder, Furniture Sculpture 1980-1990, Genève, Musée d’art et d’histoire, 1990.
(1) John Armleder, Furniture Sculpture 1980-1990, Geneva, Art and History museum, 1990.
Liste des œuvres :
List of works :
à rebours 1, 2017,
sérigraphies
dimensions variables
à rebours 2, 2017
cornets de glace publicitaire
130×40×56cm
sérigraphies
dimensions variables
à rebours 2, 2017
cornets de glace publicitaire
130×40×56cm
à rebours 1, 2017
silkscreen prints
variable dimensions
à rebours 2, 2017
advertising ice cream cones
130×40×56cm
silkscreen prints
variable dimensions
à rebours 2, 2017
advertising ice cream cones
130×40×56cm

à rebours - salle 1, 2017
Affiche
John M Armleder est né en 1948 à Genève où il vit et travaille. Il est l’une des figures les plus influentes d’une scène artistique suisse héritière désinvolte de l’abstraction géométrique. C’est en développant de manière visionnaire des notions majeures, qui préoccupent l’art contemporain aujourd’hui, que son œuvre présente un intérêt historique, au sujet de l’appropriation et du relativisme de la signature, de l’équivalence entre l’art et les autres productions matérielles, du devenir décoratif des avant-gardes ou de l’exposition comme moyen artistique. Son travail multiforme (peintures, sculptures, installations, performances, expositions) est largement diffusé en Europe et dans le monde où il participe à de nombreuses expositions et biennales et est représenté par de nombreuses galeries.
John M Armleder was born in Geneva in 1948, where he lives and works. He is one of the most influential figures on the Swiss art scene, which has inherited geometric abstraction. His work is of historical interest for its visionary development of major notions that preoccupy contemporary art today, such as the appropriation and relativism of the signature, the equivalence between art and other material productions, the decorative future of the avant-garde, and the exhibition as an artistic medium. His multi-faceted work (paintings, sculptures, installations, performances, exhibitions) is widely distributed in Europe and around the world, where he takes part in numerous exhibitions and biennials and is represented by numerous galleries.
Cette exposition et sa fabrication fait l'objet d'un entretien publié dans Ileana Parvu, Jean-Marie Bolay, Bénédicte le Pimpec, Valérie Mavridorakis (éd.), Faire, faire faire, ne pas faire, Head (Haute école d'art et de design de Genève), 2021
This show and it's making is the subject of an interview published in Ileana Parvu, Jean-Marie Bolay, Bénédicte le Pimpec, Valérie Mavridorakis (éd.), Faire, faire faire, ne pas faire, Head (Haute école d'art et de design de Genève), 2021
La Salle de bains reçoit le soutien du Ministère de la Culture DRAC Auvergne-Rhône-Alpes,
de la Région Auvergne-Rhône-Alpes et de la Ville de Lyon.
Ce projet a reçu le soutien de Pro Helvetia, Fondation suisse pour la culture, et s’inscrit en Focus du programme Résonance de la 14e Biennale de Lyon.
de la Région Auvergne-Rhône-Alpes et de la Ville de Lyon.
Ce projet a reçu le soutien de Pro Helvetia, Fondation suisse pour la culture, et s’inscrit en Focus du programme Résonance de la 14e Biennale de Lyon.




